Attachement : aimez-vous vos patients ?

Démarré par Victoria, 05 Août 2013, 16h

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Victoria

Bonjour à tous,

Etudiante en fin de carrière de Psychologie, je m'intéresse tout particulièrement à ce mode de prise en charge ... Je m'interroge sur les éventuels liens d'attachement qui se créent (forcément?), puisque les patients peuvent rester dans une famille d'accueil durant plusieurs années. Peut-on dire que vous 'aimez' vos patients? Et dans le cas où des liens d'attachement/d'amour se développent, comment gardez-vous, familles d'accueil, l'effet thérapeutique ?

cat

Bonjour Victoria,

Aimons-nous nos patients, vaste sujet !
Premièrement, ce ne sont pas nos patients mais nos accueillis, ce qui est un peu différent.
Je dirai qu'effectivement un lien affectif se crée forcément, sans quoi on ne pourrait pas supporter de les laisser partager notre quotidien.
De la à parler d'amour...  tout dépend de ce que l'on met dans ce mot...

Nos accueillis ne sont pas des membres de notre famille, ni même nos meilleurs amis.
Et personnellement, il me semble important de savoir garder une certaine distance.
Par exemple, chez moi, le vouvoiement est de mise, et il y a des "bornes" à ne pas dépasser.
Quand mon accueillie a commencé à vouloir se mêler de l'éducation de mes enfants, j'ai mis les points sur les i tout de suite.
D'ailleurs, cette personne sait parfaitement quand elle va trop loin, et elle évite autant que possible avec moi.
Si on se prend trop d'affection pour nos accueillis, il y a le risque que nous ne puissions plus poser des limites qui sont pourtant nécessaires au bien-être commun (accueillant-accueillis + les familles des deux côtés) et  de plus, les familles des accueillis risquent d'avoir l'impression qu'on leur vole l'affection des leurs. De même que nos conjoints et enfants pourraient finir par avoir le sentiment que nos accueillis leur vole notre affection.

C'est en tout cas mon point de vue... J'espère que d'autres accueillants répondront à votre question qui est intéressante et peut permettre à de futurs accueillants de bien comprendre la spécificité de notre métier.

Courtoisement,
Claribel

Etienne

Bonjour Victoria,

Comme l'écrit fort justement Cat : en accueil familial "social" comme en AFT, les accueillis ne sont pas "nos patients" mais "des patients" : ceux de leurs soignants.
Nous partageons avec eux notre quotidien et, sauf exception, des liens se créent. Certains accueillis sont particulièrement en demande d'affection - comme celui qui s'obstine à m'appeler "Papa", alors que je n'ai que 5 ans de plus que lui !
Personnellement, nous refusons toute confusion avec une relation paternelle, filiale ou de couple : je leur rappelle que je ne peux les considérer, au choix, que comme des amis de passage, des cousin(e)s, des tatas ou des tontons que "j'aime bien", sans aller jusqu'à en être amoureux. Des compagnons de route pour quelques jours, mois, années, car l'accueil est forcément provisoire.
Plusieurs années après leur départ, nombre d'entre eux nous tiennent au courant de ce qu'ils deviennent, nous écrivent, nous téléphonent, passent nous voir.
Ça fait toujours plaisir, mais si on ne savait pas "tenir ses distances", on se trouverait vite envahis !

Famidaquement, Étienne & Mimi
(qui tient également, très fermement, ses distances avec les messieurs qu'on accueille : saut à nouvel an ou pour leurs anniversaires, pas de bisous !)

Utilisateur anonyme

Bonjour Victoria ,

Pour ma part ,je ne parlerai pas d'amour pour expliquer le lien entre accueillant et accueilli .Pour ma part ,je suis confrontée à cette situation .
J'ai un fils de vingt ans et un accueilli de  vingt-cinq ans qui est effectivement en quête du mot "amour" .Cet accueilli a été abandonné à sa naissance et  au début de son accueil  a éprouvé beaucoup de jalousie par rapport à la complicité entre mon fils et moi .Pas facile pour lui de découvrir une maman faisait des bisous à son fils ,à une maman attentive ,chaque moment de complicité ,rires ,film regardé en famille ,dialogue ,etc provoquait chez cet accueilli  un manque important s'exprimant par la phrase quotidienne "j'aurai voulu que tu sois ma maman " .Nous lui avons à plusieurs reprises rappelé que je n'étais pas sa maman mais bien là pour l'aider à évoluer et grandir (il en a besoin ) et que nous allions  passer quelques temps ensemble pour travailler son projet de vie ,vers un retour à l'emploi protégé et peut-être un jour un logement indépendant .Des distances sont importantes ,nous posons des limites mais inévitablement des liens se créent et il reste impossible d'être insensible à leurs moments de tristesse ,de joie ,etc ..Nous sommes avant tout des êtres humains .Chaque accueillant ,chaque accueilli réagit différemment et bien sûr comme tout être humain ,nous avons plus d'affinités suivant la personne qui croise notre route .
Famidaquement
Gribouille

delavaux

Bonjour,

En formation assistante sociale, je prépare un mémoire sur l'AFT. Je cherche à rencontrer des familles d'accueillants pour pouvoir affiner mes réflexions. Je ne suis qu'au début de mes recherches terrain mais ce qui m'intéresse pour le moment est le lien entre l'accueillant et la personne accueillie. Je me demande comment les familles parviennent à garder une distance, est-il "absolument" nécessaire de garder cette fameuse distance "professionnelle" ? Dans quelle mesure est il possible de conserver une "indépendance" affective par rapport à la personne. Je m'interroge aussi sur l'importance de la connaissance de l'histoire du patient, de son passé. Je m'interroge aussi sur l'équilibre familial propre à la famille d'accueil avant l'accueil à proprement parlé, sur les incidences de l'accueil sur cette équilibre.

J'ai élaboré un questionnaire et j'aurais souhaité pouvoir échanger avec une famille.
Je vous serais extrêmement reconnaissante de faire suivre mon message pour que je puisse me mettre en contact avec au moins une famille.

Bien cordialement,
Vanessa Delvaux

bouadi


Belén

Bonsoir Vanessa,

Si vous le souhaitez, vous pouvez nous contacter ou nous faire passer votre questionnaire via notre adresse : henrifaud (arobase)free.fr

Nous avons accueilli des personnes souffrant de maladie mentale pendant une douzaine d'années ...
Cordialement
Belén Alonso

nini

je lis votre message et ça m'aide beaucoup   je dois accueillir une personne de 30 ans qui a été accueilli par une personne tres âgée qui n'a plus eu son renouvellement  d'agrément lié à son age et à la maladie de son mari qui est très grave et qui affecte aussi cette personne fatigue ...mais ce jeune homme c'est beaucoup attaché à cette mamy qu'il considère comme sa vraie mamy et vis versa donc c'est un accueil comme si c'est une mamy qui accueil son petit fils très chouallé gâté sans un reproche et on ne la pas préparé à cette évidence de quitter un jour cette famille vu l'age on va lui dire au dernier moment j'ai un peu peur de mal tourner mes mots et je voudrais tant trouver les bons mots   il va venir 1j 1 week et en tout tant    mais il n'est pas prêt du tout à ce changement personne n'ose lui dire   et j'ai besoin d'aide,j'ai 50 ans et c'est sur que ça va lui changer

Jean

Bonjour, nous accueillons depuis début novembre 2015 un homme d'une trentaine d'années, ancien délinquant, déjà incarcéré, psychotique, paranoïaque etc.. tout plein de bonnes choses sympathiques. C'est une personne respectueuse mais qui nécessite une surveillance et un cadrage constant.
Mon épouse s'en occupe 24h/24, moi je travaille à l'extérieur.
Cette personne a une odeur, bien que nous l'obligions à prendre une douche quotidienne. J'ai de plus en plus de mal à supporter sa présence, sa mollesse, son odeur. Nous ne pouvons le laisser seul à la maison. Aucune confiance en lui, exemple : il est capable de partir se promener ou monter se coucher en laissant tout ouvert.
C'est une charge que je trouve envahissante pénible. Ma vie s'en trouve gâchée. Dois-je dire à mon épouse que nous devons arrêter ?
Pensez vous qu'avec le temps je pourrais m'habituer ou qu'avec un autre accueilli ça se passera mieux ?
Il reste 3 ans à mon épouse avant la retraite. Je ne pense pas tenir si longtemps. D'autres personnes ont-elles ce ressenti ou ont-elles connu le même vécu ?
Jean

Claribel

Bonsoir Jean,

L'accueil familial a ses limites...
Et il semble que vous ayez atteint les vôtres depuis un moment.
Prenez le temps avec votre épouse de réfléchir et discuter de la situation. Pourquoi je n'en peux plus ? Qu'est-ce qui pourrait améliorer les choses ?
Si la situation peut être améliorée tant mieux, faites le au plus vite. Mais si tel n'est pas le cas, alors il est peut-être temps de changer d'accueilli.
Cela ne veut pas dire "virer" celui-ci, mais lui donner un préavis, éventuellement l'aider à trouver un nouveau lieu. Et bien sur, discuter avec lui de la situation et de votre besoin d'arrêter.
Dans un même temps, mettez-vous en recherche d'un nouvel accueilli.
Nous savons tous que trouver un nouvel accueilli n'est pas chose aisée et que du coup, parfois on tire sur la corde de peur de manquer du revenu nécessaire !
Mais se mettre en danger pour cela n'est pas une bonne chose.
Si vous continuez ainsi sans rien changer, combien de temps durera votre patience, votre couple ?

Arrêter un accueil quand on a atteint les limites, ce n'est pas un échec, c'est du professionnalisme.
Nous avons tous des limites et même si elles ne sont pas les mêmes, il est important de les connaître pour éviter de les dépasser.

Je vous souhaite bon courage !
Cordialement,
Claribel

Jean

Merci Claribel pour ce regard juste et pertinent.
Changer de placé, pourquoi pas, mais est-ce la personne ou le fait de se sentir privé de liberté par la présence d'un étranger, d'être obligé de tolérer, de prendre sur soi quotidiennement, d'organiser son emploi du temps, donc celui des autres.
A moins que la patience me lâche, je me donne jusqu'à l'été pour arrêter ou pas cette activité. Pas simple, j'ai déjà dit à mon épouse que je ne tiendrais pas 3 ans. Elle semble l'ignorer.
Hier on parlait de congés, je lui ai avoué qu'à part l'été où il partira 4 semaines, je ne souhaite pas prendre de vacances quand il est à la maison. Pas envie de voir sa tête toute la journée.
Aucune réaction de sa part, je peux comprendre. A son âge, trouver un employeur ce n'est pas simple. Le souci est que ce travail impacte tous les habitants de la maison. Mieux vaut travailler à l'extérieur, le domicile reste un lieu intime où l'on se ressource. Enfin ça c'était avant
Merci encore et bonne fin de journée
Jean

karole

Bonsoir Jean,
Malheureusement, ce que vous évoquez, est il me semble une mauvaise évaluation de ce qu'implique notre métier au quotidien, quand votre épouse à décidée de devenir accueillante.
Quand je vous lis, je ressens que vous ne pouvez concevoir d'accueillir chez vous des personnes qui doivent être intégrées à notre famille, c'est  le principe même de l'accueil familial...
Si réellement le travail de votre épouse met en danger votre couple et votre famille, il faut mieux qu'elle arrête cette activité.
Être accueillant, c'est vivre au quotidien avec nos accueillis, partager, nos sorties, nos repas, notre vie de famille tout simplement.

Il me semble que votre réflexion avec votre épouse avant son engagement n'a pas été explorée à fond, quand je lis ce que vous écrivez : "je ne souhaite pas prendre de vacances quand il est à la maison. Pas envie de voir sa tête toute la journée.
Aucune réaction de sa part, je peux comprendre. A son âge, trouver un employeur ce n'est pas simple. Le souci est que ce travail impacte tous les habitants de la maison. Mieux vaut travailler à l'extérieur, le domicile reste un lieu intime où l'on se ressource. Enfin ça c'était avant
"


Le choix de notre métier futur et maintenant actuel à été discuté, évalué, en long et en large, avec tous les membres de la familles. Nous avions compris avant de nous engager tous ce que cela impliquait dans notre vie de tous les jours.

Je vous souhaite bon courage, mais franchement, le mieux, ce n'est même pas de changer de personne à accueillir, mais de voir avec votre épouse, pour qu'elle arrête ce métier, car si vous écrivez que "votre domicile doit rester un lieu intime où l'on se ressource", ce ne sera jamais le cas, même si vous prenez une autre personne. Être accueillants, c'est 24/24/ h et 7/7 j .... (Ce qui ne nous empêche pas de nous évader de temps en temps pour un petit week-end en amoureux, pour nous ressourcer, ou de partir en vacances 15 jours tous les étés seuls avec notre fils)

Karole

Claribel

Bonsoir Jean,

La sensation que j'ai, c'est que vous êtes à bout suite à un accueil qui ne vous convient pas !
Cela ne veut pas dire que vous n'étiez pas, au départ, partant pour l'accueil familial. Ni que vous n'étiez pas conscient de l'exigence particulière et importante de ce métier...
Par contre, pour qu'un accueil se passe bien, il faut absolument imposer des limites dès le départ, sous peine d'être débordé et de finir pas en arriver à ne plus supporter de voir son accueilli en permanence, comme cela semble être votre cas.

Pour moi, il y a déjà un problème de dialogue au sein de votre couple. Bien que la peur de perdre un revenu soit très légitime, il ne faut pas non plus en oublier sa famille, son conjoint.  De plus, chaque accueil est différent, et je connais des accueillis qui sont heureux dehors dans le potager, en promenant le chien ou en s'occupant de diverses manières. Du coup, l'accueil est bien plus facile à gérer dans le quotidien.
Par ailleurs, un couple, une famille qui accueille a absolument besoin de se garder des temps spécifiques. Cela peut se traduire par un repas par semaine auquel les accueillis ne participent pas. Ils peuvent par exemple manger avant et aller se promener ou se retirer dans leur chambre afin de laisser la famille profiter de ce moment. Il est important aussi de pouvoir faire des sorties, au restaurant, en week end... Pour cela, soit vous avez un remplaçant qui vient à votre domicile, soit vos accueillis partent dans une autre famille ou dans un établissement, ou encore quand c'est possible, dans leur propre famille.

Je me répète mais bien que l'accueil soit effectivement très contraignant, il ne doit pas vous étouffer.
Je vous propose, si vous le souhaitez, d'en discuter de vive voix... (05.65.72.82.73)

Prenez soin de vous !
Cordialement,
Claribel

Jean

Bonjour Karole
Je suis d'accord avec vous. L'accueil ne doit pas être fait pour moi. Au départ ce n'est pas une démarche de notre part. Nous avons été sollicités et contactés. Certainement en raison de l'expérience de mon épouse qui a travaillé 28 ans dans un foyer pour handicapés. Nous nous sommes dit pourquoi pas. A chaque entretien avec les divers intervenants de l'hôpital et du cmp j'ai tenu le même discours. C'est l'opportunité qui fait qu'on est là. Si je ne suis pas réfractaire à l'idée, je ne peux pas vous assurer que ça me conviendra. J'aurais pu dire nous mais je savais que mon épouse trouverait dans cet accueil une motivation.
Le souci est qu'il s'agit d'être humain et qu'on ne peut pas les jeter comme un vulgaire mouchoir papier.
Je pense essayer encore quelques mois, jusqu'à l'été. Et si je n'évolue pas alors il faudra soit stopper l'activité soit nous pourrir l'existence

Bonjour Claribel
Je pense que tout simplement je ne suis pas fait pour accueillir une personne à temps complet chez moi. C'est trop intrusif.
Vrai qu'il existe certainement un problème de dialogue, d'échanges dans le couple. Peut-être la peur de casser son projet? Ce travail lui convient parfaitement. Elle aimait beaucoup ce métier et avait en charge des personnes handicapés qu'elle faisait travailler. Elle montait des projets, des séjours, etc.. voilà voilà
Merci pour le n° de Tel, pourquoi pas mais pas de la maison, donc pas simple pour l'instant - jeanchalduc(arobase)yahoo.fr
Bonne journée
Jean